CLAUDE FRERES - La passion de l'habitat sain
PME familiale créée en 1979 par le père de l’actuel dirigeant, l’entreprise Claude Frères s’est aujourd’hui démarquée des autres sociétés de maçonnerie par la passion de son dirigeant : le chantier sain, en particulier grâce à l’emploi de matériaux de construction bio sourcés, comme la chaux. Rencontre avec ce maçon, pour qui chaque nouveau chantier rime avec nouvelle aventure.
Les Cahiers de l’Environnement : Pouvez-vous nous retracer la genèse de la création de votre entreprise ? Mon père, maçon lui-même, l’avait créée avec mon oncle il y aura quarante ans l’année prochaine. Dans les années 80, ils ont des demandes d’enduits à la chaux. Mais, à l’époque, la reconstruction de l’après-guerre a favorisé l’essor du ciment au détriment de la chaux. C’est pourquoi mon père, accompagné par la CAPEB, fait venir des artisans du Sud, qui, eux maîtrisent toujours ce savoir faire. Petit à petit, l’entreprise se spécialise dans les travaux de rénovation avec des matériaux d’origine naturelle. En 1997, mon oncle part à la retraite. Je décide alors d’intégrer l’entreprise et prends des parts au capital. Mon père a lui-même quitté la société en 2004, je suis donc désormais gérant de cette PME qui emploie quatre salariés.
L.C.E : Pourquoi vous être spécialisé dans ce type de travaux ?
D’abord par passion. J’ai le goût du bel ouvrage et la volonté de me démarquer des autres entreprises de maçonnerie qui travaillent avec des matériaux actuels, sans aucun souhait de se pencher sur la transmission de savoir-faire ancestraux, comme la création d’un enduit intérieur ou extérieur à la chaux, la réalisation de fresques…Par ailleurs, il existe un marché pour la rénovation de bâtiments anciens et des propriétaires désireux de confier la rénovation de leur patrimoine bâti à des experts. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de me spécialiser dans ce type de prestations. Ainsi, je peux vous citer un chantier où je suis intervenu pour la restauration d’un château classé, à Saux-les-Vesoul. J’ai projeté du chanvre pour isoler le bâti tout en respectant son écosystème et préserver la santé des occupants.
L.C.E : Quels sont les vrais points forts des matériaux bio sourcés par rapport aux matériaux de construction actuels ?
Si l’on prend l’exemple de la chaux, ce matériau respecte le bâti ancien. Il s’harmonise avec lui et le laisse respirer (il reste perméable à la vapeur d’eau) c’est à dire qu’il ne va pas emprisonner de l’eau dans les murs, qui resteront donc sains. Le duo chaux-chanvre est par ailleurs un très bon isolant thermique qui va en plus gérer les problèmes hygriques. Il est parfaitement adapté au bâti ancien, durable, sain, sans polluants (formaldéhyde etc… qui durant toute leur vie vont dégager
leur nocivité dans les logements). Actuellement sont également utilisés beaucoup d’isolants à base de produits pétroliers qui ne laissent pas respirer les murs, dans lesquels vont pouvoir se développer des moisissures, des champignons etc… Combien de cas d’asthme ou d’allergies me sont rapportés, causés par le recours à des colles, contenant des éléments extrêmement nocifs pour les bronches, ou par la pose d’autres produits qui enferment l’humidité, et, par voie de conséquence, provoquent des problèmes ORL ou dermatologiques. C’est donc à la fois une source de plaisir personnel de travailler avec des matériaux naturels, mais aussi un souci de ne proposer à mes clients que des composants respectueux de leur santé… Enfin, un enduit à la chaux intérieur et extérieur reste une technique ancestrale mais parfaitement dans l’air du temps.
L.C.E : Comment se travaille la chaux ?
Je dirais plutôt les chaux, car il existe deux types de chaux:
- La chaux hydraulique, qui est une chaux à base de calcaire plus ou moins argileux, et qui va donc donner des classes de résistance (de dureté) différente :
NHL 5 : très dure : utilisation pour la chape intérieure,
NHL 3,5 : corps d’enduit, travaux de maçonnerie,
NHL 2 : maçonnerie et enduit de finition
et corps d’enduit.
La chaux hydraulique durcit au contact de l’eau. Elle peut donc être utilisée en grosse masse (mur épais).
-La chaux aérienne, elle, est une roche composée à 98 % de calcaire, qui va être chauffé à 900°. Cette opération la libère de son gaz carbonique. Elle devient alors une chaux vive. Celle-ci était utilisée dans d’autres temps pour assainir les écuries en badigeonnant ses murs. Dans le bâtiment, cette chaux vive est éteinte en l’hydratant avec de l’eau, puis elle est séchée. Elle peut ensuite être utilisée pour la construction, mais elle est plutôt réservée pour la couche de finition, pas très épaisse (comme les enduits, les badigeons, les patines) car elle durcit au contact du gaz carbonique qu’elle absorbe… et la boucle est bouclée, car elle retrouve ainsi son état initial ! Si vous réchauffez à 900 ° ces enduits, vous obtenez à nouveau de la chaux vive. C’est le cycle de la chaux, qui justifie pleinement son côté naturel bio sourcé.
L.C.E : Au-delà de l’emploi des matériaux sains, adoptez-vous des gestes spécifiques pour garantir un chantier 100% éco-responsable ?
Tout-à-fait. A chaque chantier, pour nettoyer mes outils, je fabrique des bacs de décantation pour éviter de polluer les eaux. Pour ce faire, j’utilise un géotextile qui va retenir les particules de la chaux. L’eau saine s’infiltre alors dans le sol. En fin de chantier, je récupère tous les gravats et je vais les stocker pour pouvoir les ré-exploiter ensuite en remblais. Une façon de travailler qui représente une vraie valeur ajoutée pour certains clients, particuliers ou institutionnels, soucieux de recourir à des professionnels investis d’une volonté forte de respecter l’environnement.
L.C.E : Participez-vous à des événements dédiés à la construction ?
Je prends en effet une part active dans certains salons locaux, comme le salon “Planète et énergie”, qui se déroule chaque année, fin janvier- début février, à Épinal, ou lors de petits salons de l’habitat, comme celui de Faucogney (70), où, je réalise des démonstrations de mon savoir-faire pour transmettre aux générations futures la façon de travailler la chaux. Je suis aussi un membre actif de la CAPEB, qui défend les intérêts des artisans.
Entreprise CLAUDE FRERES 2 Bis Rue Géneral de Gaulle 88160 Le Menil Tel :06 84 72 53 50 www.claude-freres.fr